Dix ans après la crise financière, la CSSF a poursuivi en 2019 sa mission de surveillance prudentielle en articulant son action autour de 5 priorités : la protection des consommateurs et des investisseurs, l’innovation financière et la digitalisation, la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, la revue des modèles d’affaires et les risques liés aux changements climatiques. Pour faire face à ces défis, elle a par ailleurs poursuivi ses efforts de transformation au travers de sa stratégie CSSF 4.0.
Le monde de la finance face à ses challenges
Dix ans après la crise financière, les banques luxembourgeoises sont bien capitalisées et disposent de ratios de solvabilité et de liquidité au-delà des exigences minima. L’industrie des fonds d’investissement connaît une croissance constante. « En même temps, nous ne sommes pas à l’abri d’une nouvelle crise économique ou financière, l’Union des marchés de capitaux est loin d’être achevée, et la rapidité du changement technologique et de la digitalisation qui touche l’économie réelle impacte également le secteur financier », explique Claude Marx, directeur général de la CSSF. Le secteur reste face à des défis de taille : rentabilité en berne, systèmes informatiques obsolètes, formation des collaborateurs au nouvel environnement et aux attentes des clients et des investisseurs, nouveaux entrants sur le marché et nouveaux risques
Les 5 domaines d’actions prioritaires de la CSSF
– La protection des consommateurs et des investisseurs
Cette mission fondamentale de la CSSF concerne tous les métiers sous sa surveillance. Dans ce contexte, l’autorité veille particulièrement au respect des obligations de transparence et de type MiFID II. « Les consommateurs méritent une attention toute particulière par rapport à leur exposition à des produits spéculatifs ou risqués », souligne Claude Marx. Ainsi, le régulateur a interdit en 2019 la vente d’options binaires aux clients non-avertis et a émis des restrictions concernant les contrats sur différences. La CSSF a également poursuivi ses efforts en matière d’éducation financière, notamment en lançant un site dédié letzfin.lu, des jeux et applications pédagogiques respectivement des outils permettant de mieux gérer le budget familial et l’argent de poche. « La meilleure façon de protéger les consommateurs est de les éduquer, et cet effort doit commencer très tôt, dans les écoles où la CSSF a participé à des campagnes de sensibilisation », précise-t-il.
– L’innovation financière et la digitalisation
La digitalisation et les Fintech sont des sujets importants pour la CSSF. Ainsi, le régulateur a développé un dialogue permanent avec le marché, a assisté à de nombreuses conférences comme orateur ou participant, a été à l’écoute de nouveaux projets à un stade précoce, a publié des guidances à l’instar du livre blanc sur l’intelligence artificielle (Intelligence artificielle : Opportunités, risques et recommandations pour le secteur financier) et a travaillé en continu sur l’adaptation du cadre de surveillance (exemple : modernisation du cadre de l’usage du cloud dans les secteurs sous notre surveillance prudentielle), le tout dans un contexte de digitalisation et d’inter-connectivité accrues. Un accent particulier a été mis en 2019 sur les ICOs (Initial Coin Offering), les nouveaux services de paiement sous la directive PSD2 (Payment Services Directive 2), ainsi que les KYC utilities (services en matière de connaissance des clients). La CSSF a eu des échanges actifs avec d’autres autorités en bilatéral, suite à la signature d’accords de coopération dédiés, ou au sein de groupes de travail internationaux comme l’EFIF (European Forum for Innovation Facilitators) et le GFIN (Global Financial Innovation Network). Elle a également contribué aux travaux des autorités européennes comme par exemple le rapport de l’EBA (European Banking Authority) sur Big Data and Advanced Analytics. Enfin, elle reste attentive aux risques liés à la digitalisation et à la dépendance croissante de systèmes informatiques, et notamment au risque majeur de cybercriminalité.
– La lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme
L’une des missions de la CSSF est de contribuer à la stabilité financière parfois mise à mal par la criminalité financière. « Le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme ne sont pas des thèmes nouveaux, mais sont plus que jamais d’actualité dans la mesure où de nouveaux acteurs, par exemple dans le domaine des monnaies virtuelles, risquent d’abuser du système financier à des fins de blanchiment », souligne Claude Marx. La surveillance en la matière se fait sur une approche basée sur les risques, et sera d’ailleurs étendue aux professionnels traitant des actifs virtuels en application de la Ve directive AML (Anti Money Laundering). La CSSF a affiné son approche basée sur les risques en publiant des analyses sectorielles, notamment sur la banque privée, secteur identifié à haut risque. Elle a aussi mis en place des groupes de travail composés d’experts LBC/FT (lutte contre le blanchiment des capitaux / financement du terrorisme) de la CSSF, du secteur surveillé et de la Cellule de renseignement financier (CRF), et a intensifié ses campagnes de sensibilisation notamment par l’organisation de conférences sectorielles.
– La revue des modèles d’affaires
Le risque de rentabilité reste important pour de nombreuses banques et autres entités surveillées au Luxembourg comme en Europe. Ce risque est dû à différents facteurs : une pression continue sur les marges d’intérêts, une augmentation plus rapide des dépenses d’exploitation que des revenus opérationnels, due notamment au coût de la réglementation et à l’augmentation des salaires dans le secteur financier, et aux investissements importants dans la modernisation des systèmes informatiques et la digitalisation. « Trop de banques et de gérants de fortunes au Grand-Duché ont encore un volume d’activité en-dessous de la masse critique leur permettant de faire face à ces charges. Il est ainsi à prévoir que les entités de petite taille et celles qui n’adapteront pas leurs modèles d’affaires aux attentes des clients et au monde digital seront amenées à disparaître », commente Claude Marx. La CSSF surveille le risque lié aux modèles d’affaires dans le cadre de la protection des investisseurs et déposants.
– Les risques liés au changement climatique
Le réchauffement climatique et son impact sur l’environnement sont devenus d’importants facteurs de risque à plus long terme, comme l’a d’ailleurs souligné la dernière édition du Rapport sur les risques mondiaux du Forum Economique Mondial. Le Mécanisme de Surveillance Unique de la zone euro a réalisé en 2019 deux enquêtes à grande échelle afin de mieux comprendre où se situent les banques en termes d’intégration des risques liés au climat et à l’environnement dans leur stratégie commerciale, leur gestion des risques et leurs cadres de gouvernance. Ces travaux se poursuivent en 2020 avec la formulation d’attentes prudentielles. Le Green Deal de la Commission européenne prévoit une mobilisation de la finance privée aux côtés de la finance publique. Les règlements communautaires Disclosure, Benchmark et Taxonomie permettront de mieux caractériser les investissements durables, et d’éviter ainsi le greenwashing néfaste à la confiance des investisseurs. Claude Marx souligne que « le Green Deal ne pourra se faire sans l’investissement responsable, et la CSSF est prête à soutenir la transition vers une finance durable, que ce soit au niveau national ou au niveau international ». L’autorité agit notamment dans le cadre du Network for the Greening of the Financial System dont elle est membre. Et de poursuivre : « une économie basée sur les critères ESG (critères environnementaux, sociaux et de gouvernance) sera plus résiliente, et il n’y aura pas d’économie durable sans finance durable. Avec près de 5.000 milliards d’actifs sous gestion au Luxembourg, notre pays pourra avoir un impact important quand une majorité d’acteurs intègreront les investissements durables dans leur stratégie commerciale en les considérant comme opportunité et non comme un pis-aller. » Un effort non négligeable d’éducation des consommateurs, des investisseurs mais aussi des acteurs de la place financière est requis. Il s’inscrit dans la mission d’éducation financière de la CSSF. Les modèles de rémunération devraient par ailleurs intégrer une composante de durabilité dans les objectifs des dirigeants des acteurs du secteur financier.
La CSSF investit dans l’avenir
Afin de faire face à tous ces challenges et mieux répondre aux attentes de ses parties-prenantes, la CSSF a entrepris depuis 2018 un programme de modernisation appelé CSSF 4.0. Ce programme poursuit quatre objectifs : efficience, transparence, meilleure interaction avec le marché et gestion des risques. Il comprend une dimension technologique, avec par exemple l’usage de la big data et de l’intelligence artificielle, une dimension organisationnelle basée sur une organisation lean et agile, et une dimension humaine avec un accent important sur la formation, les agents ayant bénéficié de 41.000 heures de formation en 2019.
Un exemplaire papier de la version française du rapport peut être obtenu gratuitement auprès de la CSSF, courriel : direction@cssf.lu, sur simple demande.
_______
La Commission de Surveillance du Secteur Financier
La Commission de Surveillance du Secteur Financier (CSSF) est un établissement public qui assure la surveillance des professionnels et des produits du secteur financier luxembourgeois. Elle supervise, règlemente, autorise, informe et, le cas échéant, effectue des contrôles sur place et sanctionne. Elle est, par ailleurs, chargée de promouvoir la transparence, la simplicité et l’équité sur les marchés des produits et services financiers et veille à l’application de la législation en matière de protection des consommateurs financiers et de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme.
La CSSF conduit ses missions de surveillance prudentielle et des marchés dans le but de contribuer à la solidité et à la stabilité du secteur financier et ce, exclusivement dans l’intérêt public.
La CSSF est placée sous autorité du Ministre des Finances, mais dispose d’une autonomie financière et d’action telle qu’exigée par les plus hautes instances internationales. Elle compte un effectif de 900 agents hautement qualifiés.